Quand la « gratitude » devient une prison dorée
Deuil, émotions, sourire forcé, bienveillance toxique et masques sociaux. Parfois, pleurer, c’est être vivant.

Depuis longtemps, la société ne supporte pas la tristesse, le « je vais pas bien » voire « je vais mal ». J’ai pu constater que lorsque nous vivons un deuil, faut faire la paperasse, les ventes de bien s’il y en a…
Mais c’est quand on a le droit de pleurer la personne chère.
Car soyons clair, dans cette société de masques permanents, et je vous reparle de cette génération « marche ou crève ». Dites le si je vous soule, hein, LOL, on est entre nous. Donc je disais, dans cette société, tout doit être lisse, on doit pas montrer. On nous répète qu’il faut être positif. Vibrer haut. Être en gratitude. Qu’il faut dire merci à l’univers même quand t’es à genoux. Ou dans la vase jusqu’au dessus du chakra couronne.
Néanmoins, quand vous vivez un deuil, un choc, un effondrement… Vous faites quoi ? Vous souriez quand vous avez envie de hurler ? Postez un mantra quand vous avez juste envie de pleurer ?
Non, la plupart du temps, vous choisissez votre masque en ouvrant un tiroir dans votre garde robe, le matin avant de partir au taf. Tiens aujourd’hui c’est : « sourire de convenance », même si vous êtes détruite à l’intérieur ?
STOP


Vous avez le droit d’aller mal
Oui, vous avez le droit d’aller mal. De vous sentir vide. De traverser une saison pourrie sans vous faire engueuler par les injonctions bien-être. Notamment, celle qu’il faut absolument être dans la gratitude absolue. Ou pourquoi vous dites des choses négatives ? Que faut pas ramener ses emmerdes au boulot et pourrir l’ambiance.
Mais merde, c’est quoi ça. Si on vit un truc vraiment moche, comme le suicide d’un proche. On n’a pas le droit d’être choquée ? D’avoir de la peine ? De se sentir coupable ? Non ?
Parce qu’il faut bien se dire que parfois, la vraie lumière, c’est de rester avec notre douleur. De l’écouter. De la laisser nous enseigner. La laisser sortir pour pas qu’elle nous ronge l’intérieur. Et que même si nous sommes en mode Niagara Falls niveau larmes, ben c’est ok.
Notre douleur, même si les autres ne la comprennent pas, est venue jeter comme un gros pot de peinture gris foncé sur notre vie. Elle va pas repeindre tout en rose avec des paillettes. Ou avec un pot de peinture arc-en-ciel, qui n’existe pas d’ailleurs. Et ça n’est pas non plus un filtre Instagram pour faire illusion, qui va nous faire sortir de ce cloaque de tristesse.

Et si on écoutait vraiment notre peine ?
Que se passerait-il si nous écoutions vraiment notre peine ? Si nous allions au bout de nos larmes, pour voir nos blessures en face ?
Peut-être bien qu’à un moment, et j’en parle car je l’ai vécu, nous pourrions sourire un peu. Mettre quelques touches de couleurs sur tout ce gris. Certes, pastel dans un premier temps. Avec un pinceau qui a trois poils, pas trop en mettre pour pas faire trop de contraste non plus.
Mais nous laisser le temps de vivre notre deuil, notre effondrement, de récupérer du choc reçu. Car si nous ne le faisons pas, le corps lui s’en souviendra. Le corps emmagasine tout. Il nous parle en permanence et nous ne savons pas l’écouter. Cela dit, si nous le laissons agir en écoutant nos émotions, il se « soigne » de lui-même. C’est une très belle machine. Notre allié le plus sûr si nous savons en prendre soin.



La gratitude viendra plus tard. Pas tout de suite, et c’est ok
Là, tout de suite, si ce dont vous avez besoin, c’est de rentrer dans votre coquille. Ben allez y, c’est peut-être juste ne pas trahir votre ressenti.
Stop à la performance de : « je vais tenir sans pleurer ». Marre du « je vais bien », dans cette société qui veut des masques sourire de façade, de la bonne mine en boite, dès le réveil. Dis toi bien que tu vis un choc, un deuil, une claque cosmique… pourtant on te sort des mantras à la lavande ?
Avons-nous perdu le sens commun à ce point ? Si nous n’allons pas au bout de nos larmes, que se passe-t-il ? Pour une fois, si nous nous autorisons à accueillir notre tristesse par exemple ou toute autre émotion ? Il se passe quoi ?
Est-ce que ça va empêcher la terre de tourner… bien sûr que non, elle s’en fout la terre.
Tu peux pas cracher des affirmations positives avec un nœud dans la gorge. Tu as besoin de hurler, ou juste rester silencieuse, dans le vide. Assise sur ton lit, sans maquiller la douleur, sans te maquiller toi non plus. C’est ton droit.
Alors, oui ça peut mettre les gens mal à l’aise, mais ça leur appartient. Non ?
Souvent, on entend : bon ben tu vas pas chialer pendant des jours ? Pourquoi pas ? Qui a décidé qu’un deuil, c’est 3 jours pour un parent, 1 jour pour une tante, zéro pour un grand-père par alliance ?
Au-delà, de ce que prévoit la « loi », basta. Trois jours pour pleurer son père ou sa mère, ça suffit non ??? Ben non ? ça suffit pas, car ça nous ramène à notre rôle d’enfant. A notre rôle de parents pour nos enfants, à notre propre mort.
Parfois, certaines blessures — comme celle de l’abandon — ne cicatrisent jamais vraiment.

Puis doucement, on repeint son univers…
Et puis à un moment, on sent que ça s’adoucit peu à peu. Qu’on reprend pied, que des couleurs se diffusent, un peu plus vives.
Et doucement, tranquillement, nous reprenons le chemin du sourire. Du cœur. De la gratitude car cette expérience nous a rendu plus fortes. Nous a permis de nous dépasser. Nous nous retrouvons différente, mais plus sereine car nous nous sommes permis d’aller au fond des choses grises.
Alors non, la gratitude ne vient pas toujours sur commande. Parfois, elle vient après les sanglots, les nuits sans sommeil, le goût du vide et le rejet des autres.
Mais elle finit toujours par venir. Si on s’écoute. Si on se fout la paix. Et c’est là qu’elle devient vraie. Pas une prison dorée. Une lumière intérieure.
Vous avez envie de partager votre traversée dans le gris foncé ? N’hésitez pas à me contacter, ça me fera plaisir d’échanger avec vous. Et peut-être que nous remettrons quelques touches de couleur par ci par là. Pourquoi pas ? La vie est faite de tellement de surprise.
