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Et les autres, ils existent plus ou quoi ?

Quand on se focalise sur celui qui nous rejette, on oublie ceux qui restent. Et pourtant, c’est là que l’amour vrai continue de vibrer, en silence.


On va pas se mentir : quand quelqu’un qu’on aime vous claque la porte à la tronche — surtout un proche, un enfant — ça fait mal.  Et ce qui est encore plus tordu, c’est qu’on passe nos jours, nos nuits, notre énergie… à penser à celui ou celle qui nous rejette. Du coup une question m’est venue : et les autres, ils existent plus ou quoi ?

Car rendons nous à l’évidence, c’est vrai que les autres, ben on les zappe. Pourtant, ils sont là, tendent la main, aiment sans condition. Et ça nous fait du bien hein, c’est clair.

Mais quand même, j’ai pu constater que parfois on devient obsédé par une absence. Alors qu’on a de la présence partout autour. Et si je vous raconte tout ça, c’est que je suis passée par là et que j’ai su m’en sortir. Alors je ne suis pas une « héroïne » pas exagérer quand même, mais j’ai compris le chemin, même si ça a été long.

Faut bien comprendre que quand la porte claque, votre monde s’effondre. On veut pas y croire, c’est pas possible ?  Ça nous arrive pas à nous. C’est un mauvais rêve.. Comment a-t-on pu en arriver là pour une phrase de travers ? Qu’est-ce qui s’est joué dans cet instant ?

Alors au début, on fait notre «Calimero», on pleure genre Niagara Falls en continu en se prenant la tête dans les mains. On est sidéré, anéanti. Les questions arrivent : mais pourquoi moi ? Qu’est ce que j’ai fait au bon Dieu pour mériter ça ?

Et puis d’un coup, y’a un truc qui se passe dans la tête : on veut réparer, comprendre, rétablir le lien. Comme si tout dépendait de nous et rien que de nous.

Alors on se concentre à fond pour réagir quand il ou elle est là. On tente de nourrir ses besoins, mais bien sûr on n’y arrive pas. Ca serait mieux de parler, mais là encore, tout nous reste coincé dans le gosier. Ou alors on sait tellement plus être soi, qu’on se liquéfie, on se planque. Pas blesser une fois de plus car c’est notre faute hein.

Et puis parfois, il y a eu des mots durs, alors on s’auto-flagelle de nouveau. On repense à ce qu’on a mal dit, mal fait, pas fait. Et dans le cas d’un enfant ? C’est encore pire. Parce que la société, les psy, les phrases toutes faites, tout ça vous balance :

« Un enfant, on l’aime inconditionnellement. » Alors quoi ? On doit tout tolérer ? Même l’injustice, même l’humiliation, même la disparition sans un mot ? Merci du coup de pelle, je vais pleurer dans mon coin et tout est parfait ?

Tout d’abord, de la famille : mais tu vas chialer pendant combien de temps ? Qu’est ce que t’as fait pour qu’il ou elle réagisse de la sorte ?

De toutes façons, c’est bien connu que c’est la faute de la mère hein ?

Des phrases sinistres, des tentatives de rabibocher, qui en fait viennent mettre de l’acide sur les plaies de l’un comme de l’autre.

De la personne elle-même, qui veut revenir ou pas. Qui met des conditions à son retour, parce que ça se fait pas de laisser la famille. Ou qui se crée des films dans sa tête avec son conjoint. J’ai le souvenir d’une amie qui me racontait que son frère, pensait que sa mère n’aimait pas sa femme. Et sa femme ayant cette impression aussi, avait fait pression pour qu’il coupe les ponts. Et puis lui, disait se sentir plus apprécié dans la famille de sa femme. Sa mère a été gravement malade et il n’a pas bougé le petit doigt. Lorsqu’elle est décédée, il n’a pas bougé non plus, à la grande tristesse de mon amie.

Mais il est important aussi de noter également la pression qu’on se met toute seule. Comment je vais m’aplatir pour qu’il ou elle revienne. Quelles blessures j’active en moi et quel masque je mets lorsque je le ou la croise ?

Ben eux… on les oublie. Pas volontairement, mais nous sommes tellement pliée sur notre douleur qu’on les relègue au silence. Comme s’ils étaient moins importants. Pourtant ils sont là. Ils appellent, posent des questions, respectent. Ils nous soutiennent, nous disent leurs ressentis par rapport à la situation.

« Maman, vous avez fait tout ce que vous avez pu avec papa. Vous avez changé, vous avez osé d’autres choses. Et nous, on a eu une enfance heureuse ».

Alors on les regarde mais on ne les voit pas vraiment. On les écoute, mais ça ne rentre pas vraiment dans notre sphère de compréhension. Ils souffrent de notre incapacité à redevenir nous, et on ne se rend pas compte de leur peine. C’est là que c’est injuste : car on ne s’aperçoit pas, qu’on met tout notre amour sur la seule personne qui ne le veut plus. Et qu’on donne des miettes aux autres. Jusqu’au jour où l’on prend conscience de cela.

D’un coup, on se dit : mais en fait pourquoi je me concentre sur celui ou celle qui me fait souffrir ? Pourquoi je mets mon attention là où il n’y a que silence, voire mépris? Qu’est ce que ça m’apporte de ruminer tout ça ? Est-ce que vraiment je suis cette mauvaise personne qu’il ou elle décrit ? Est-ce que ça n’est pas son point de vue avec sa lorgnette, qu’il ou elle, tient peut être à l’envers ?

Personnellement quand j’ai pris conscience de cela, j’ai lâché. Pas par vengeance. Par survie. Et j’ai réouvert les yeux. Sur les autres. Sur ceux qui étaient là en silence à me soutenir. Je me suis dit que non, je n’étais pas ce qu’il décrivait. Non j’avais fait beaucoup de chemin et sa vision des choses lui appartenait. Je m’en détachais car ça n’était pas moi.

Espérer, jusqu’à quand ? Jusqu’où ?

Alors certaines fois, des clientes me demandent : franchement, faut-il continuer à espérer ? Ben ça dépend de l’histoire, de l’intention, de l’espace qu’on laisse. Parfois, l’autre a besoin de temps. De silence. De fuite. Et il est important de savoir ne pas insister.

Mais parfois, il est encore plus important de se protéger. Se rappeler qu’on existe, qu’on a le droit de vivre même sans cet amour là.Que la vie est trop courte pour se fustiger en permanence. Que le regard que porte la personne qui est partie, c’est son propre prisme. Sa vision des choses ou de celle de son entourage.

Que l’énergie négative que nous trimballons en permanence, ne nous permet pas d’évoluer. Et que lâcher prise, c’est aussi nous permettre de revenir vers une énergie plus lumineuse.

Ce genre de coup de pelle émotionnel, je l’ai aussi retrouvé dans le roman Une Évidence d’Agnès Martin-Lugand. Quand le fils, Noé, découvre que sa mère lui a menti sur l’identité de son père, c’est trop. Il fugue. Il explose, il la hait limite. Il se réfugie loin d’elle, pour survivre. Et de son côté Reine, ne sait plus comment réagir car elle se sent trop coupable. Mais là encore, l’amour n’a pas disparu. Il est juste devenu trop douloureux pour rester au contact.

Se dire que même s’il y avait des raisons pour qu’il ou elle vous traite ainsi, y’a un moment où il faut décider.

➡️ Est-ce que je continue à saigner pour celui ou celle qui me rejette ?

➡️ Ou est-ce que je nourris les liens vivants ?

C’est pas simple. Mais c’est vital. Arrêter de croire que s’acharner, c’est aimer plus fort est hyper important. Aimer, c’est aussi respecter l’autre. Mais aussi se respecter soi.

C’est comprendre que quelque chose a pu déclencher ce rejet, mais que nous ne sommes pas ce rejet.

Voilà ce que je voulais vous partager.

Personnellement, aujourd’hui, je ne cours plus après les ombres. Je regarde la lumière qu’il y a autour. Les regards doux. Les attentions discrètes. Les gens qui restent sans faire de bruit. Je leur dis merci. Et je me dis merci aussi. D’avoir arrêté de me punir.

Par contre, je sais que beaucoup d’entre vous sont encore sur ce cheminement. Se punissent de l’absence de celui ou celle qui ne veut plus de leur présence. Ou qui leur balance des reproches en permanence.

Ca n’est pas facile de se dire que toutes ces critiques, justifiées ou pas d’ailleurs, ne sont pas nous. En tant que maman (parents), nous sommes toujours là pour nos enfants. Parfois maladroitement, mais avec le cœur. Bien sûr imparfaites sinon ça se saurait si la vie était un long fleuve tranquille de perfection.

C’est un choix. Celui de vivre. Et d’aimer, là où c’est encore vivant. Et puis à un moment, lorsque nous changeons notre énergie pour aller de l’avant, des miracles peuvent se produire. Je l’ai vécu et même si ça n’est pas une victoire en soi, c’est un espoir. Tout peut arriver en prenant soin de soi et en changeant notre vulnérabilité en force.

Ce texte vous a interpellé.e ? Vous avez envie de partager votre vécu, où vous sentez que seule ça va être compliqué ? n’hésitez pas à me contacter